Mis à jour le 28 juin 2023

Fabien Gargam : un chercheur féru d’Issy-les-Moulineaux

Âgé de 44 ans, ce docteur en sciences de gestion s’est intéressé dans sa thèse au modèle de réussite de la ville, qui a su transformer au fil des années ses faiblesses en forces.

Il n’y a jamais habité mais il connaît pourtant Issy-les-Moulineaux comme sa poche ! Et pour cause : Fabien Gargam a consacré une partie significative de son doctorat à la cité isséenne, en observant au microscope son ascension pendant plus de trente ans. Soutenue fin 2016, sa thèse vient de faire l’objet d’un article dans la revue Gestion 2000, une référence dans le monde académique francophone des sciences de gestion. Rencontre avec ce chercheur atypique et intarissable sur la ville.

Issy.com : D’où vient ce vif intérêt pour Issy-les-Moulineaux ?

Fabien Gargam : Après un master recherche à l’école des Mines, j’ai entamé en 2011 une thèse à l’École polytechnique. Il s’agissait d’une thèse industrielle, c’est-à-dire effectuée dans une entreprise. Elle se déroulait dans un laboratoire de certification et mon rôle était de l’aider à se développer sur le marché du « smart grid » (réseau électrique intelligent, ndlr). Or Issy-les-Moulineaux venait de lancer IssyGrid, un projet permettant à un écoquartier de mieux gérer son électricité. J’ai contacté les responsables de la ville pour échanger, et ils m’ont immédiatement répondu.

Votre thèse a pris alors un tournant radical…

Absolument ! J’ai eu un coup de cœur immédiat pour Issy et l’angle de ma thèse avait aussi évolué. J’ai donc voulu comprendre comment cette commune avait réussi à se sortir d’une situation si chaotique. Au début des années 80, c’était un lieu dévasté qui ressemblait à une ville fantôme avec ses friches industrielles. Le taux de chômage était très élevé et les habitants fuyaient la ville. En parallèle, je me suis intéressé à quatre autres organisations qui avaient rencontré des difficultés puis connu le même destin, dont l’entreprise Michel et Augustin.

Comment avez-vous procédé pour analyser les mutations de la ville ?

J’ai effectué un long travail autour des archives de Point d’appui. J’ai parcouru tous les numéros de ce magazine depuis 1980. C’était nécessaire de se replonger dans l’histoire de la ville pour en comprendre son présent. J’invite d’ailleurs les habitants à relire de vieux Point d’appui, cela permet de se rendre compte de la transformation radicale d’Issy-les-Moulineaux.

Justement, comment qualifieriez-vous cette transformation ?

Le maître-mot a été l’innovation ! Les premières entreprises à s’implanter ont été celles de presse écrite et de télévision. La ville est devenue une terre de médias. Il y a eu ensuite évidemment l’arrivée de Microsoft. Par ailleurs, Issy-les-Moulineaux a su s’imposer comme une ville très moderne et connectée.

Au cœur de votre thèse, il y a le concept d’ « underdog ». Que signifie-t-il ?

J’ai découvert ce mot aux Etats-Unis, il n’avait pas d’équivalent en français. Il désigne une personne ou une organisation aux maigres ressources qui ne devait pas gagner au départ mais qui va pourtant réussir. Le tout grâce au travail, à la volonté ou encore à la passion. Quand André Santini a été élu maire en 1980, beaucoup de choses allaient mal. Il a été visionnaire et a réussi à surmonter les faiblesses de la ville. Il en a changé radicalement l’image.

Quel souvenir gardez-vous d’Issy-les-Moulineaux ?

La première chose qui m’a marqué est le bâtiment de la mairie, si différent de celui des autres villes (rires). Plus généralement, j’ai eu le sentiment de découvrir une ville très calme et apaisée.

Vous vivez en Chine depuis cinq ans. Pourquoi ce choix ?

Je n’avais aucun lien avec ce pays. J’ai eu l’opportunité d’aller travailler à l’université Renmin, une faculté d’excellence située, entre autres, à Suzhou. Aujourd’hui, j’ai la chance d’enseigner à des étudiants qui auront plus tard de grandes responsabilités en Chine et à l’international.

Outre les sujets liés aux entreprises et organisations, vous êtes également un spécialiste de la lutte contre le dopage…

J’ai toujours baigné dans le sport ! J’ai fait de la course à pied à un certain niveau. J’ai fini par exemple troisième du championnat de France élite d’Ekiden, une discipline d’origine japonaise qui consiste à courir un marathon en relais. J’ai ensuite obtenu un DU (diplôme universitaire, ndlr) consacré à la problématique du dopage dans le sport. C’est ce qui m’a amené à me spécialiser dans ce domaine.

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Un livre en préparation 

Fabien Gargam termine actuellement l’écriture d’un livre qui paraîtra en 2023. Cet ouvrage sera cosigné avec Yuzhen Xie, une spécialiste chinoise en RH qui a également écrit avec lui l’article paru dans la revue Gestion 2000. « Nous proposerons nos regards croisés sur les cultures française et chinoise, confie-t-il. Les habitants des deux pays ne se comportent pas de la même manière pour un tas de raisons. On étudiera cela sur le plan économique, social ou encore familial. »